L’un est Malien, héritier de la grande civilisation Dogon, il s’appelle Yambo Ouologuem. L’autre est Ivoirien, héritier d’une prestigieuse chefferie, il s’appelle Ahmadou Kourouma. (Rediffusion)
Ils écrivent l’Histoire africaine en plein cœur de Paris. Les deux livres qui les lancent dans la notoriété, publiés tous les deux en 1968, ont respectivement pour titres :* Le devoir de violence* et Les soleils des indépendances. Deux portraits décapants de l’Afrique antecoloniale et post-indépendance qui ne connaîtront pas le même destin.
Avec la participation de l’écrivain Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du prix Goncourt 2021 avec « La plus secrète mémoire des hommes » (éd. Philippe Rey et Jimsaan).
**Elgas **: Yambo Oulologuem arrive à Paris en 1960. Tout un symbole d'ailleurs, cette année qui voit beaucoup de pays africains s'émanciper. Il poursuit sa formation au prestigieux lycée Henri IV où il se forge très rapidement une impressionnante culture littéraire, sur les bases déjà de son enfance, avec l'éducation du papa. Que sait-on de cette vie parisienne de Yambo Ouloguem qui commence à frapper aux portes de la gloire littéraire?
Mohamed Mbougar Sarr : Alors voilà, Ouologuem arrive en 40. En effet, il est tout jeune et très vite, je crois qu'il est séduit par Paris, par les lumières de Paris. C'est un jeune dandy. J'ai eu quelques témoignages d'anciens camarades de classe qui le décrivent déjà extrêmement cultivé, mais aussi assez arrogant, assez moqueur, assez ironique, assez mordant, mais assoiffé de culture, assoiffé de lecture. Il fréquente les bibliothèques, il fréquente la nuit parisienne. Il est comme ça, à l'affût de ce qui se passe. Et il commence à écrire très tôt, à l'âge de 23 ans. Dès 1963, il commence à envoyer des manuscrits au Seuil. C'est un jeune immigré qui arrive, qui veut découvrir, qui a déjà un fond de culture et qui veut l'enrichir, mais à tous les vents.